Vous avez l’impression de passer vos journées à endosser des rôles avec vos collaborateurs ? Tantôt nounou, tantôt père fouettard, mais qu’est-ce qu’ils ont tous à venir vous poser des questions incongrues à longueur de temps ? D’ailleurs ça vous fait perdre le vôtre de temps, vous aimeriez vous concentrer sur l’essentiel. Si vous jonglez à chaque instant, c’est que vos collaborateurs n’en sont pas au même stade sur le chemin de l’autonomie.
Découvrez les 4 phases de l’autonomie, détectez où se situent chacun de vos collaborateurs et apprenez à les accompagner vers le pallier recherché : l’interdépendance.
Le chemin vers l’autonomie
Phase 1 : LA DÉPENDANCE
C’est une évidence mais si on fait une analogie avec notre propre évolution, les bébés naissent totalement dépendant de leur mère, pour manger, se laver, s’habiller, bref pour toutes les fonctions essentielles de leur existence mais également pour combler les besoins d’estime de soi. La Pyramide de Maslow s’exprime aussi dès le plus jeune âge.
Pour l’aparté une expérience menée au Moyen-Age par l’empereur Frédéric II a consisté à placer 6 nourrissons dans un environnement totalement coupé de communication avec d’autres personnes. Seuls les besoins physiologiques étaient satisfaits. La légende raconte que tous soient morts rapidement, sans avoir prononcé le moindre mot, ce qui tenterait à prouver que l’être humain ne peut se développer sans communication ; nous sommes des êtres fondamentalement « sociaux ».
Un être humain en phase de dépendance ne peut pas, ne sait pas fonctionner sans une aide extérieure. Vous repèrerez facilement un collaborateur en phase de dépendance puisqu’il vous demande sans cesse les mêmes choses, il semble n’avoir pas compris, il est dans le doute permanent. C’est aussi celui qui est perdu sans son smartphone, qui panique quand sa batterie descend à 15% à la recherche d’un chargeur, incapable de trouver une route, un resto, sans son GPS (j’avoue je me reconnais dans ce comportement), persuadé que toutes les réponses de sa vie se trouvent dans son téléphone.
Au fond, il ne cherche pas des réponses à ses questions, il les a déjà. Il rentre dans une expression non verbale de demande de relation comme il pourrait le faire avec une autorité parentale pour que vous le rassuriez. Si c’est vous qu’il sollicite c’est qu’il vous fait confiance. Il est important d’écouter ses besoins, bien plus que de répondre à sa demande immédiate, redemandez lui les fondamentaux de sa fonction, ce qu’il a compris. Accompagnez le à son rythme, ne brusquez pas les choses. Vous allez devoir passer du temps avec lui, vous assurer qu’il a bien compris ce qu’on attendait de lui, qu’il vous le montre et qu’en retour vous lui montriez de la gratitude.
C’est le principe même de fonctionnement des ateliers créés par la fondation AMIPI dans lesquels des porteurs de handicap mentaux sont réinsérés par le travail, en suivant leur rythme, en s’adaptant à leurs capacités cognitives et en développant progressivement leurs capacités neurologiques. Je vous invite à consulter le site et comprendre comment les personnes ont pu évoluer grâce au travail.
Phase 2 : LA CONTRE-DÉPENDANCE
Il va se mettre à dire NON. Il entre dans une phase d’opposition systématique. Cette phase de contre-dépendance est une phase de recherche du désir propre, de l’individualité, de l’affirmation de soi, c’est une étape marquée par l’égoïsme, par le refus de l’autorité et du jugement d’un niveau de compétence du manager insuffisant.
Il rentre dans une compétition avec son environnement immédiat. Il peut saboter des projets de développement en refusant toute modification, il protège ses acquis. Il aura tendance à s’isoler, à éviter le contact avec les autres ou au contraire de les provoquer dans un désir d’affrontement.
Pour le repérer, c’est assez simple, c’est le collaborateur conflictuel, chaque sujet est une occasion de vous mettre en défaut.
Votre arsenal de défense est multiple, les réponses doivent être proportionnées, en replaçant systématiquement les rôles respectifs de chacun. Si vous devez passer par des sanctions disciplinaires, ne tardez pas. Soyez vigilants toutefois à ne pas rentrer dans son jeu de l’opposition et d’affirmation disproportionnée de votre autorité, vous ne feriez que renforcer cette attitude.
Préférez un accompagnement axé sur l’expression de ses envies, de ses désirs profonds, des points communs entre ses valeurs intrinsèques et celles de l’entreprise. Recréez un climat de confiance en multipliant les occasions d’approfondir de la connivence entre vous. Prouvez lui que vous le respectez dans son entièreté avec en ligne de mire vos attendus de son implication. La CNV (communication non violente) sera votre plus grande alliée pour sortir de cette phase. (voir article sur les techniques utilisées : CRAPPO, DESC, OSBD…*)
Gardez à l’esprit que cette phase même si elle est parfois nécessaire doit être la plus courte possible, c’est celle qui peut nuire le plus dangereusement à l’entreprise et aux relations internes.
Phase 3 : L’INDEPENDANCE
Cette 3° phase semble à 1° vue bénéfique puisque le collaborateur indépendant veut explorer toutes ses capacités, mu par une assurance et une confiance à toute épreuve, persuadé d’être meilleur que les autres. C’est une phase totalement narcissique.
Cependant, celle-ci vient contre carrer le fonctionnement de groupe. Vous vous souvenez de l’adage : « Tout seul on va plus vite, à plusieurs on va plus loin », l’indépendant est typiquement dans une volonté de faire tout seul car il estime être plus rapide, plus performant, plus efficace que les autres et il compte bien le montrer.
Un individu indépendant fragilise les groupes, dans leur ambiance, leur but, leur moyens de résoudre les questions et peut devenir aussi source de conflit. Soyez également vigilant à ne pas sans le vouloir mettre les individus dans cette case par exemple lorsque vous les mettez en compétition les uns par rapport aux autres. C’est l’exemple assez fréquent dans des équipes commerciales qui sous la volonté de se « tirer la bourre » oublient l’émulation de la motivation et cherchent à prouver leur valeur et leur supériorité. Coups bas, défiance, communication biaisée, voici la 1° conséquence si vous laissez vos équipes dans cette phase.
Pour les accompagner vers le 4° stade de l’autonomie, valorisez avant tout l’esprit d’équipe, retravaillez la raison d’être de l’entreprise et les valeurs communes entre l’entreprise et les personnes. Mettez en place des modes de communication facilités à l’intérieur du groupe (Slack, whats app…). Montrez que
- vous leur faites confiance individuellement et collectivement
- vous acceptez et valorisez les prises d’initiatives
- vous encouragez les partages d’expérience entre les membres.
4° Phase : L’INTERDEPENDANCE :
Dans cet ultime stade de développement de l’autonomie, le collaborateur interdépendant sent à nouveau le besoin de contact et demande. Il est devenu capable de s’exprimer et de demander, parce qu’il a appris à reconnaître son désir, parce qu’il sait qu’il existe en tant que personne et parce qu’il est libre. Cette phase doit être le but de tout manager pour ses équipes. Pour cela, il faut :
- De l’autonomie
- Laisser du champ libre
- De la reconnaissance.
Pour aller plus loin dans l’accompagnement vers l’autonomie, ce petit extrait va vous faire comprendre le sens de la Permission, une arme puissante de motivation et de confiance:
Qu’est ce qui nous fait nous sentir beau, intelligent ou encore audacieux par exemple? Croyez-vous que cela vient de notre propre regard sur nous ?
Rien de tout cela, pour citer Eric Berne :
« On ne dira jamais assez que le fait d’être belle n’est pas une question d’anatomie mais de permission parentale. L’anatomie nous rend photogénique mais le seul sourire du père fait naitre la beauté dans le regard d’une femme. »
Il en est de même pour toutes nos qualités, nous les voyons, les développons si les autres les ont « validées », nous donnant la permission d’y croire.
Donner une permission à un proche (un membre de sa famille, un collaborateur) c’est lui donner un coup de pouce pour avancer de manière autonome. Nous sommes souvent peu clairvoyants sur nos qualités alors qu’il est plus aisé de repérer chez les autres leurs talents naturels. Dites-vous qu’il en de même pour tout le monde et qu’il est enfin temps de distribuer de la permission en masse.
Encouragez l’initiative, laissez-lui toute sa place, glissez quelques garde-fou et les talents respectifs vont s’exprimer. Pensez à leur donner la permission de s’exprimer à nouveau en les accueillant à bras ouverts.